Aujourd’hui on va discuter de l’état mental qui nous submerge quand la rechute arrive.
J’avais trouvé dès le début de mon Covid Long ce magnifique schéma qui m’avait donné espoir.
J’étais encore un bébé Covid Long et je me raccrochais à toutes les branches pour que ma vie ne parte pas en lambeaux.
Spoiler : Votre vie va partir en lambeaux, l’échelle temporelle de la maladie est si grande que votre vie va en être impactée.
Ce que j’ai vécu à chaque fois
J’ai eu 3 périodes de mieux depuis mon début de Covid Long en 1 ans et 3 mois.
C’est peu mais ça existe.
La première a durée très peu de temps (2 jours), donc je n’ai pas eu le temps de m’y accommoder. Je me sentais enfin comme avant ! Les idées claires, le corps fonctionnel, pas de douleurs. C’était incroyable de voir que c’était possible ! Mon corps est encore capable de fonctionner normalement !
Ca n’a pas duré, la faute à une séance de kiné. J’avais fais 1h30 de cardio tellement j’étais heureux d’aller mieux. Of course je suis tombé en crash juste après couplé à 2 mois de rechute intense 👏.
Cette première fois a été frustrante pour plusieurs raisons :
Le plus difficile c’est de s’en vouloir d’avoir “forcé” (comme si je n’avais plus le droit à mon état de santé pré-covid).
J’ai aussi eu l’impression que cela n’ira plus jamais mieux. On m’a laissé entrevoir le paradis pour me replonger dans l’enfer le plus terrible du jour au lendemain.
L’incompréhension. Pourquoi mon corps est capable de fonctionner parfaitement ? Puis d’être complètement déréglé du jour au lendemain… Comme si il y avait un interrupteur que quelqu’un s’amusait à actionner.
Les deux autres fois, c’était plus insidieux car mes périodes de félicitées et de grâces ont duré respectivement 3 semaines puis 1 mois et 11 jours (oui je compte).
Dans ces cas précis j’ai eu, malheureusement, le temps de penser que la maladie était derrière moi, j’ai même écrit des ébauches “Comment j’ai guéri du Covid Long” (triste avec le recul).
L’ascenseur émotionnel… Je commençais à dire à tout le monde que j’allais mieux, que je pensais que c’était bientôt la fin de ce calvaire, j’ai même repris du boulot !
La deuxième période de grâce s’est terminée mi-février 2023, je n’ai pas fait la même erreur au niveau du travail, je n’ai rien pris de nouveau. J’ai fait passer le message que mon état de santé ne me permet pas d’être fiable.
Par contre j’ai fait l’erreur de dire que j’allais mieux à pas mal de monde… Et c’est là que la maladie frappe de nouveau évidemment.
Cette sensation terrible quand les symptômes recommencent doucement, oppression thoracique légère pendant le sommeil, maux de tête typique qui recommencent doucement, mais suffisamment pour se dire “Non…Sérieux, non pas encore.”
Le Covid Long me “force” à déprimer
On va rentrer dans le très subjectif. Au creux des vagues je suis “forcé” à être en déprime intense.
Avec le temps je me suis habitué aux vagues, à chaque fois et malgré l’acceptation de ma condition, j’ai un sentiment fort de déprime qui va parfois jusqu’à des idées noires.
C’est comme si quelque chose était profondément dysfonctionnel et que j’étais forcé à être pessimiste, c’est lié à une chimie complexe, elle même liée à la maladie.
Il faut savoir que le Covid Long agit directement sur votre humeur, on ne sait pas encore exactement comment, peut-être la production d’hormone liée à la dysautonomie couplée à des perturbations chimiques dû à un métabolisme déréglé ? On le saura dans quelques temps, pour l’instant il faut composer avec.
Lutter contre le pessimisme forcé
C’est systématique, je perd tout espoir très rapidement quand j’ai une rechute. Je me dis que finalement je ne retrouverai jamais ma vie d’avant.
Pourtant qu’est-ce que j’en sais ? Personne ne le sait en réalité aujourd’hui.
Certains disent qu’après les 12 premiers mois il n’y a plus d’espoir de guérison, pourtant je vois des dizaines de témoignages exprimants le contraire, c’est donc possible.
Comment expliquer ces jours où je me sens comme avant ? Comme si la maladie n’était qu’un souvenir, voire même une invention que j’aurai eu ? C’est paradoxal mais ces jours de félicités existent bel et bien. Une anomalie dans la maladie, ou un aperçu du futur et de la guérison ?
Penser autrement, face à la réalité
Pendant mes précédentes période de creux, je me disais “cool je vais retrouver ma vie d’avant”, c’est non seulement candide, mais également faux.
Je ne retrouverai jamais ma vie d’avant, et tant mieux !
La souffrance fait partie du processus d’une vie épanouie. Les rescapés de terribles épreuves, ont vécu l’horreur, des difficultés immenses et pourtant ils sont souvent plus heureux face à la réalité de la vie que les autres (une fois le trauma surmonté j’entends).
Par réalité de la vie, j’entends l’énorme pile de problèmes qui nous tombe dessus périodiquement sur le dos depuis notre naissance.
Le Covid Long comme toutes les maladies graves, longues et éreintantes nous fait mûrir et grandir intérieurement. Notre résilience augmente fortement. Je n’ai plus la même crainte face à des problèmes qui paraissent insurmontables à la plupart des gens (Ou à mon ancien moi).
Le Covid Long a cette capacité, de changer complètement notre philosophie :
Que puis-je espérer ?
Que dois-je faire ?
Que puis-je connaître ?
Nous devons revoir les réponses que l’on avait imaginées pour ces questions. Les mettre à jour en fonction de la nouvelle mesure étalon de la réalité de notre vie.
Prenons mon cas
Avant j’espérais parvenir à une sorte d’accomplissement professionnel et financier basé sur la productivité, comment devenir extrêmement bon dans mon domaine, gagner suffisamment pour être “heureux”.
Ce que j’espère principalement aujourd’hui, c’est trouver et partager des moments agréables et stimulants avec des personnes ouvertes d’esprits et enrichissantes, tout en évitant la toxicité. Mon objectif est d’améliorer ce que je peux tout en restant fidèle à mes valeurs.
On atteint jamais le bonheur, puisqu’il est déjà là. Dans le creux, dans la vague, dans le tumulte, dans l’action. Apprendre à apprécier la vague en elle-même, le sentiment de plénitude qui vient juste après l’avoir passé, c’est ça qu’il faut viser.
Par exemple : Les souvenirs forgés avec les personnes qui nous ont aidé ou que l’on a aidé durant l’adversité. Ou la fierté d’avoir finalement vaincu ce problème que l’on pensait si insurmontable.
Sans vague on se perd, on a besoin d’objectifs, on a besoin de surmonter des épreuves, on a besoin de souffrir au final. Le creux sans vague n’a pas de sens.
Conclusion
Sur cette fin très (trop) philosophique, je suis content d’avoir tout de même posé tout cela textuellement.
J’espère que cela aidera ceux tout en haut d’une vague, dans les pires moments du Covid Long, dans l’incompréhension de leur situation, dans la frustration de l’injustice (“Pourquoi moi ?”) de cette maladie.
Vous verrez petit à petit les effets bénéfiques sur votre subjectivité et la force mentale que cela va vous apporter sur le long terme.
Restez là.
Quant à moi, j’apprécie le creux de bientôt 3 mois que m’accorde le Covid Long jusqu’à la prochaine vague 🌊
Tellement vrai (et dur). Merci de ce beau texte.